Ouverture anticipée des cols pour les cyclistes: gouvernement et parlement disent non

[Article mis à jour le 16 décembre 2021 avec la décision du parlement cantonal]

Une ouverture anticipée des cols alpins à tout type de mobilité douce, une semaine avant l’ouverture officielle aux véhicules motorisés? L’idée était plutôt bonne, évidemment me direz-vous du point de vue d’un cycliste. Mais elle avait tout de même été soutenue par 72 députés contre 39 au Grand Conseil valaisan en novembre 2020. Les députés Julien Monod (PLR), Jean-Daniel Melly (Les Verts), Tarcis Ançay (AdG/LA) et Bruno Moulin (PDCB) avaient alors fait accepter à l’automne 2020 le postulat «Utiliser nos cols de montagne comme atout touristique».

La réponse du gouvernement cantonal était attendue et c’est non. Pour le Conseil d’Etat, le canton en fait déjà assez pour la promotion du vélo et, surtout, il ne faut pas toucher aux motorisés: «Concernant l’ouverture anticipée des cols à la mobilité douce une semaine avant l’ouverture officielle aux véhicules motorisés, il ne nous apparaît pas opportun dans le sens qu’il (sic) repousserait dans les faits l’ouverture à tous les autres usagers d’une semaine. Pour des raisons de sécurité et de proportionnalité financière, il n’est pas raisonnable d’anticiper les ouvertures. Ces cols, outre leur attractivité pour la mobilité douce, ont aussi une fonction de mobilité touristique plus large, que ce soit pour les voitures ou les motos par exemple, qu’il y a lieu de ne pas péjorer.»

Ride the Alps à Moosalp, quelques heures de « mobilité péjorée » pour les motorisés qui ont pu rapidement retrouver leur royaume…

Pour les postulants, la mesure proposée devait permettre au Valais «d’offrir la possibilité de vivre une expérience « vélo-VTT » unique, qui restera gravée dans la mémoire. Les mois de mai-juin sont souvent considérés par les acteurs du tourisme comme des périodes creuses, difficiles à vendre. Une des solutions pourrait venir du vélo/VTT. Cette période correspond pour les cyclistes à une période de reprise, de motivation intense et d’intérêt pour les grands espaces.»

Le gouvernement estime que le soutien des autorités aux diverses cyclosportives et organisations privées comme «Climb the giants» doit suffire. «Par exemple, l’initiative Climb the Giant/Ride the Alps, mettant à disposition exclusive des accès comme Moosalp, la Croix-de-Cœur, ou encore le Sanetsch à la mobilité douce, offre des tronçons mieux adaptés et augmente l’attractivité de nos sites alpins pour en faire un atout touristique pour notre canton.» Si on peut saluer ce soutien, on peut en même temps déplorer le manque d’ambition général, l’un n’empêchant pas l’autre.

On peut aussi trouver pour le moins spécieux les arguments de la sécurité et de l’inégalité de traitement. Je ne sais par exemple pas trop à quoi il est fait référence lorsque le Conseil d’Etat écrit « Il [le Service de la mobilité] s’assure entre autres que la sécurité des cyclistes soit assurée vis-à-vis des autres usagers des routes empruntées, ouvertes à la circulation.» On a certes vu fleurir quelques panneaux «attention cyclistes» sur la route du Grand-Saint-Bernard ou celle entre Ovronnaz et Leytron, mais leur effet sur la sécurité des deux roues non motorisés reste à démontrer. Pour le reste, on voit surtout de la peinture jaune que l’on efface dès que la place vient à manquer.

Ouvrir les cols aux seuls cyclistes quelques jours par année semble poser un problème d’égalité de traitement au gouvernement cantonal. Mais où est l’égalité de traitement des cyclistes depuis que la LAT (en 1979…) exige de leur construire des aménagements dédiés? Où est l’égalité de traitement lorsque les cyclistes doivent renoncer à certains itinéraires trop dangereux en raison d’une circulation motorisée trop importante et rapide, comme sur certains cols (la Forclaz, entre autres) ou d’un défaut d’entretien?

Le 16 décembre 2021, le parlement cantonal n’a pas davantage été sensible aux arguments des promoteurs de l’idée en refusant le postulat.

Et en parlant d’égalité de traitement, on a vu naître un trottoir cyclable sur le pont entre Saillon et Saxon (j’y reviendrai, promis). Un aménagement tout neuf, de 2021. Et là, la piste « cyclable » qui longe la chaussée ne bénéficie pas des mêmes priorités aux intersections. Égalité de traitement vous dites?

Laisser les cyclistes continuer tout droit et bénéficier de la même priorité que les motorisés était visiblement au-dessus de leurs forces.

Vous voulez que ça change et que le Valais se dote d’une vraie loi pour le vélo? Soutenez et signez l’initiative populaire à ce sujet: ini-velo-vs.ch